Les lignes qui suivent ont été empruntées au livre de M. Etienne Abeille "HISTOIRE DE GIVORS" de 1912. 

 

LE CANAL DE GIVORS PENDANT LA REVOLUTION FRANÇAISE

 

Les lettres patentes de décembre 1788, enregistrées le 5 septembre 1789, présentent certains détails intéressants et sont vraiment curieuses à analyser ; surtout lorsqu'on remarque qu'à la veille de la Révolution, elles érigent le canal en fief relevant de la couronne, et que ce fut peut-être le dernier fief créé en France. Elles érigèrent le canal en fief, avec toute justice, haute, moyenne, basse, criminelle et mixte, droits de pêche et de chasse exclusifs. Les francs-bords, ports sur le Rhône, entrepôts, magasins, logements, moulins, digues sur le Gier, rigoles et autres dépendances en firent partie. Le roi inféodait, à perpétuité, fonds et tréfonds, aux actionnaires et intéressés, sous la redevance annuelle et perpétuelle d'un éperon d'or de la valeur de 150 livres tournois, payable le 31 décembre de chaque année, à compter de 1789, et d'un second éperon d'or tous les vingt ans, pour tenir lieu des droits de mutation, quints, requints, lods, ventes, etc… Enfin le canal était  exempté  d'impôts pour une période de 50 ans.

1914 - Circuit de Lyon - Le Trou de la Mort entre Givors et Rive de Gier
Le Canal et Gier

La Compagnie du Canal se trouva érigée en seigneur justicier, elle eut le droit d'établir, dans le lieu à sa convenance, un juge, un lieutenant de juge, un procureur et autres officiers de justice, lesquels, dit la décision royale, « connaîtront en première instance et jugeront tous différens qui pourront naître tant au civil qu'au criminel et mixte, soit à raison des dégradations et délits commis sur les ouvrages et de la perception des droits, soit à raison des contestations qui pourront naître au sujet de la navigation ; à la charge de l'appel immédiat en la juridiction ou cour qui en devra connoitre. Les jugements desquels officiers seront exécutoires par provision et nonobstant l'appel, jusqu'à la somme de 200 livres, tant pour l'intérêt des parties que pour les amendes que nous donnons à perpétuité aux propriétaires dudit fief, comme aussi lesdits propriétaires pourront nommer tel nombre de gardes qu'ils jugeront à propos, pour veiller à la conservation des ouvrages ».

Le barrage de Couzon - En Aval

  En réalité, la Compagnie du Canal ne put jouir de tous ces avantages. On sait que dans la fameuse nuit du 4 août 1789, l'Assemblée Constituante prononça l'abolition des privilèges féodaux, et notamment des justices seigneuriales et de l'inégalité devant l'impôt ( Du 26 décembre 1789. « Liste des cy devant privilégiés et des impositions qu'ils auront à payer : ... MM. les intéressés du Canal de Givors à Rive de Gier 1.200 livres. »  -Archives de Givors, procès-verbal de l'administration municipale du 26 décembre 1789.)

  Dès le 21 février 1791, une loi fixa au cinquantième des revenus nets, la contribution foncière des canaux et des mines. Cependant le canal de Givors ne perdit pas, à la Révolution, tous les avantages qui lui avaient été concédés en 1788. Abandonnant tous les privilèges supprimés de l'ancien régime, la société s'éleva contre la loi du 21 février 1791 en exposant que l'exemption temporaire d'impôts dont elle jouissait n'était pas un des privilèges supprimés, que le nouveau régime ne pouvait admettre, mais une partie des bénéfices qui lui avaient été alloués dans son contrat avec l'Etat, en compensation des travaux qu'elle avait faits et de ceux qu'elle s'était engagée à faire. 

Le barrage de Couzon

     Par la loi du 18 juin 1792, elle obtint la faveur d'être imposée à la contribution foncière, sur les fonds occupés par le canal et ses francs-bords, sur le pied des fonds riverains de même qualité.

     Pour ne pas anticiper, nous arrêterons ici l'histoire de la Société du Canal et de ses travaux ; nous dirons, en son temps, ce que devint l'entreprise durant la Révolution et plus tard. Nous nous occuperons maintenant des rapports du canal avec la ville de Givors et de l'influence que cette nouvelle voie de communication eut sur le développement de notre cité.

     Le projet du canal fut mal accueilli par les habitants de Givors, qui joignirent leurs protestations à celles des autres riverains, afin d'empêcher cet établissement. Telle malveillance n'a rien de surprenant : partout et toujours ce fut le lot des entreprises nouvelles. Mais ce qui est moins naturel, c'est la persistance de cette malveillance, alors que le canal était en pleine activité, et que la ville en bénéficiait. Huit ans après son ouverture, on considérait encore le canal comme une cause de ruine pour Givors ( Extraits d'une délibération de l'administration municipale de Givors du 17 août 1788, Pierre Joannon étant syndic : « La paroisse de Givord pouvoit autrefois acquitter ses impositions par rapport à son industrie, mais ses ressources sont aujourd'hui entièrement perdues pour elle, les concessionnaires du canal se sont emparés absolument de son commerce... 

     Le commerce qui se faisoit avant la navigation de ce canal dans la paroisse de Givord, consistait principalement en charbon de terre qui y était journellement transporté des carrières de Rive de Gier, par plus de 1.200 mulets, ce qui donnoit le débouché des vins et autres denrées, et en procuroit la consommation ; de là dérivoit une autre branche de commerce très importante qui étoit celui du foin, du son et de l'avoine, parce que les voituriers qui amenoient le charbon à dos de mulet achetoient en compensation toutes ces différentes denrées sur lesquelles chacun bénéficioit. Ces branches de commerce se trouvant aujourd'hui détruites pour le fait du Canal, on ne peut plus désormais compter sur l'industrie qui rendoit cette paroisse florissante ; il ne lui reste donc que son sol peu précieux qui soit représentatif de son imposition. »  - Archives municipales de Givors.)

 

Le Rocher Percé - Tartaras

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