HISTOIRE
DE LA VILLE DE RIVE DE GIER -DU CANTON ET DE SES PRINCIPALES INDUSTRIES
par C. CHOMIENNE - 1912
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HOTEL DE VILLE DE
RIVE DE GIER
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Au commencement du XIXe siècle, les services administratifs de la Ville étaient réunis dans un immeuble appartenant à M.
Besson, tapissier-ébéniste, et situé rue du Plâtre (actuellement rue Victor-Hugo). Ces services se trouvant au premier étage, on y accédait par un escalier extérieur de 6 mètres de largeur et d'une douzaine de marches ; à la suite se trouvait une cour d'au moins 30 mètres de longueur qui servait aux enfants de l'école des frères, laquelle était située en face de la place et du jardin de M. Gauthier.
Vers 1830, cet immeuble, vu le développement de la ville, n'était plus en rapport, par sa disposition et ses dimensions, avec l'importance de sa destination.
Aussi, dès ce moment, on songeait à construire un hôtel communal digne de la cité ; mais le projet restait à l'état de rêves, les finances ne permettant pas de trouver une solution pour la réalisation de l'entreprise.
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Rive de Gier - Les Joutes et
l'Hôtel de Ville
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Le 1er septembre 1837, le Conseil municipal trouve que le local est de plus en plus insuffisant et ne peut recevoir tous les services ; il vote une somme de 35.000 francs destinée à la construction d'un Hôtel de Ville et nomme une commission de cinq membres chargée d'examiner l'emplacement le plus convenable.
Le 15 février 1841, M. le Préfet engage le Conseil municipal à entamer avec la Compagnie du Canal des propositions pour l'acquisition de l'hôtel du Canal en vue d'y installer l'Hôtel de Ville.
Nous ne savons pas exactement quels sont les motifs qui, à ces deux dates, ont fait échouer les projets ; les archives de la mairie sont muettes à ce sujet. Nous ne pouvons les attribuer, en ce qui concerne le premier projet, qu'aux changements successifs qui se sont produits dans la municipalité, et peut-être aussi au manque d'emplacement propice au centre de la ville ; quant au deuxième projet, on conçoit que la Compagnie du Canal, qui se trouvait alors en pleine prospérité, n'ait pas voulu se dessaisir d'un immeuble qu'elle occupait en grande partie et qu'elle avait déjà refusé pour l'établissement d'une caserne d'infanterie.
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Rive de Gier - L''Hôtel de
Ville
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Le 21 octobre 1851, une heureuse circonstance permet d'envisager la question de façon plus positive. L'immeuble Bethenod
(anciennement Fleurdelix), situé à l'angle de la rue du Plâtre et du
quai, devint vacant. Le Conseil en vote l'acquisition moyennant le faible prix de 80.000 francs à payer par annuités, les frais de vente se trouvant à la charge de la Ville. Dans cette
vente, se trouve compris le jardin faisant suite au bâtiment et qui longe le
quai; ce jardin a été transformé, par la suite, en Jardin public (1).
(1) Voir acte de vente passé entre la Ville et Mme veuve Fleurdelix (étude de Me
Fulchiron), le 26 mai 1852.
L'Hôtel de Ville a été maintenu dans cet immeuble jusqu'en 1892; il n'y avait alors que les services administratifs et la Justice de
paix. Nous allons indiquer les motifs qui ont décidé le Conseil à l'abandonner, et à en faire la cession à la Caisse d'épargne, le bâtiment que celle-ci occupait dans le fond de la place Gauthier
(actuellement place de la Liberté) se trouvant beaucoup trop restreint pour le développement qu'avait pris cette Société dont l'état était très
florissant.
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Rive de Gier - L''Hôtel de
Ville
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L'hôtel du Canal de Givors, acquis par l'Etat, en 1886, comme dépendance du canal de même nom, devait être vendu au profit du Trésor. Il avait été décidé, toutefois, par l'Administration supérieure :
1° Que le pavillon central, sous lequel passe le canal à l'intérieur d'une voûte, serait démoli ainsi que cette voûte ;
2° Que sur le goulet, ainsi mis à découvert, on établirait un pont de dix mètres de largeur avec tablier métallique, afin de rétablir les communications entre les deux quartiers de la ville.
Ces décisions auraient eu pour incontestable résultat de détruire les dispositions et l'aspect d'un immeuble sans égal dans notre cité. Pas un Ripagérien n'aurait vu d'un bon œil l'exécution de ce projet.
Les divers services communaux se trouvant, d'autre part, fort à l'étroit dans l'ancienne mairie, le devoir incombait à une municipalité soucieuse de l'intérêt général de rechercher une installation meilleure. De là, l'idée fort naturelle d'acquérir, dans ce but, l'hôtel du Canal de Givors, qu'on préservait ainsi d'une démolition partielle, tout en faisant une excellente opération pour la Ville.
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Rive de Gier - L''Hôtel de
Ville
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Aussi, la municipalité avait suivi de près le projet de l'Etat ; elle avait étudié sérieusement la question, et le 4 juin 1889, elle adoptait une proposition d'un de ses
membres, M. Gromo, chargeant l'administration de poursuivre la question de l'achat de l'hôtel du Canal, sans cependant engager la Ville d'une façon définitive.
On se mit immédiatement à l'œuvre ; mais par suite de circonstances
diverses, ce ne fut que le 3o avril 1890 le Conseil municipal, à l'unanimité des 22 membres présents, put voter l'achat de l'immeuble.
A cette même séance, le Conseil proposa de céder l'ancien Hôtel de Ville pour l'installation de la Caisse d'épargne, au prix de 100.000
fr., proposition qui fut acceptée par cette Société (1).
(1) La place et le jardin n'étaient pas compris dans la vente.
La Ville fut autorisée à acquérir l'hôtel du Canal de Givors par décret de M. le Président de la République, en date du 11 avril 1891, portant déclaration d'utilité
publique.
Un arrêté de M. le Préfet de la Loire, du 16 avril de la même année, approuvait les travaux nécessaires, s'élevant à 60.000 francs (2), pour l'installation dans cet immeuble des services
municipaux, et comprenant la modification du pavillon central, auquel on
donnait, en l'élevant, un cachet architectural qui lui manquait.
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Rive de Gier - L''Hôtel de
Ville et le Bassin
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(2) Les travaux de réparation se sont élevés à 96.407 francs, au lieu du chiffre prévu de 60.000 francs.
La hauteur au-dessus du plan d'eau sous ce pavillon devait être au moins de 2 m. 60, afin de faciliter le passage des bateaux.
L'acte d'acquisition est du 1er juillet 1891.
Les conditions financières sont les suivantes :
1° Prix d'acquisition 3o.ooo »
2° Etablissement d'un tablier métallique 25.000 »
3° Frais d'expertise 1.000 »
TOTAL 56.000 »
La dépense totale, sans tenir compte des rabais consentis par les divers entrepreneurs, ressort donc à 116.000 francs.
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Rive de Gier - L''Hôtel de
Ville
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Rive de Gier - L''Hôtel de
Ville - Dessin Yves Ducourtioux
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Rive de Gier - L''Hôtel de
Ville - - Dessin Yves Ducourtioux
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La Ville va toucher, d'une part, un loyer annuel de 3.5oo francs pour le casernement de la gendarmerie et, d'autre part, un loyer annuel de 2.000 francs pour le service des Postes et Télégraphes et le logement du
receveur. Si, à ces avantages, on ajoute que l'installation des services municipaux ne laissera rien à désirer et que la Justice de paix aura à sa disposition un local
convenable, on peut affirmer que l'achat de l'hôtel du Canal de Givors est l'œuvre d'une municipalité soucieuse des intérêts de ses
administrés, puisqu'elle donne à la population les commodités voulues en concentrant tous les services publics dans le même
édifice, placé au centre de la ville.
L'inauguration de l'Hôtel de Ville a eu lieu le 4 février 1892, et au banquet, auquel était convié tout le Conseil municipal, M.
Lavé, premier adjoint, a prononcé un remarquable discours dont nous extrayons les principaux passages :
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Rive de Gier - L''Hôtel de
Ville - 1919
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« Messieurs,
« Cette salle dans laquelle nous nous trouvons réunis, est
aujourd'hui affectée, pour la dernière fois peut-être, à sa
destination première. C'était, autrefois, en effet, la salle des
fêtes de la Compagnie du Canal de Givors. Demain, ces tables
seront enlevées, les miettes du festin seront balayées, et ces
murs, habitués aux gais propos et aux joyeuses chansons, ne
seront plus témoins que des graves discussions des édiles de
notre cité. Puisse la franche cordialité des banquets passés
conserver ici un écho, et inspirer ainsi aux membres du Conseil
municipal les sentiments de bienveillance et de considération
réciproques,
qui rendent les délibérations faciles et aplanissent les tâches
les plus ingrates !
« J'ai pensé, ou, pour être plus exact, on m'a fait penser
qu'il ne serait pas sans intérêt, pour le plus grand nombre
d'entre vous, Messieurs, de connaître ou de se remémorer
l'historique de cet hôtel du Canal, que nous transformons
aujourd'hui en Maison commune, historique intéressant parce qu'il
comporte celui du canal de Givors, intimement lié lui-même à
l'histoire de Rive-de-Gier. J'ai, en conséquence, relevé les
dates et les faits principaux qui se rattachent à ce canal et à
ses dépendances. Je vous demande la permission de vous les présenter
ici, aussi brièvement que possible.
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Rive de Gier - L''Hôtel de
Ville 1967
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« Le canal de Rive-de-Gier à Givors est la réalisation incomplète d'une grande idée : celle de réunir la Loire au Rhône et d'établir une communication entre l'Océan et la
Méditerranée, Aussi fut-il dénommé d'abord, canal des Deux-Mers.
« C'est en 1792 que la Compagnie du Canal a commencé la construction de cet
hôtel. Les travaux en furent interrompus par la tourmente révolutionnaire de 1793, qui dispersa les administrateurs et fit placer le canal sous
séquestre.
« La construction a été reprise en 1794 et promptement achevée.
Ainsi, Messieurs, par une coïncidence heureuse, en même temps que nous inaugurons cet Hôtel de Ville, nous célébrons le centenaire de la pose de sa première
pierre.
« Il est inutile, Messieurs, de pousser plus loin ce résumé. Vous savez tous que le canal, complètement abandonné depuis 1878, a été racheté par l'Etat et que cet hôtel a
été, par suite, cédé à la Ville qui a, en outre, été autorisée à
prendre, moyennant une redevance malheureusement trop élevée, dans le réservoir de
Couzon, l'eau nécessaire à sa consommation.
« L'abandon du canal de Givors n'a eu, grâce à l'établissement des chemins de
fer, aucune suite fâcheuse pour notre ville, qui a continué à croître en population et en
prospérité.
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Rive de Gier - L''Hôtel de
Ville et le Bassin
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Les verreries ont rapidement acquis tout leur développement et les forges ont décuplé leur production.
Malheureusement, l'épuisement des mines est venu enrayer ce
mouvement. Un temps d'arrêt sensible s'est produit pendant ces dernières années ; mais nous avons le ferme espoir qu'il ne sera que
passager. La facilité des transports a fait Rive-de-Gier ce qu'il est ; son avenir dépend d'un pas de plus dans la même
voie. Que nous puissions recevoir la houille de Saint-Etienne à meilleur
compte, payer moins cher le transport de nos produits, et nos industries, vivifiées à nouveau, reprendront leur marche en
avant, à la tête du progrès. Notre population est vaillante et
tenace. Il se trouvera bien, dans le département de la Loire, un homme d'initiative qui reprendra l'idée d'Alléon de Varcourt et de
Zacharie, quelqu'un qui, soutenu par le bon droit et la justice, saura mener à bien celle idée qui, d'ailleurs, n'a jamais été complètement
abandonnée, puisqu'elle a, tout récemment encore, donné naissance à un projet étudié par le service des ponts et
chaussées. La pensée de réunir la Loire au Rhône par un canal n'est pas une utopie ; elle se réalisera et
ouvrira, pour notre ville, une ère nouvelle de prospérité.
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Rive de Gier - L''Hôtel
de Ville et le Bassin - 1907 |

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Rive de Gier - Voute de
l'Hôtel de Ville et l'Eglise Saint-Jean
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Rive de Gier - Voute de
l'Hôtel de Ville et l'Eglise Saint-Jean
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« Excusez-moi, Messieurs, d'avoir retenu trop longtemps votre attention sur des faits d'ordre tout à fait local ; mais les circonstances y prêtaient ; puis la langue se délie facilement quand on parle de ce qu'on aime ; et j'aime ce pays où je ne suis pas
né, mais où j'ai passé les meilleures années de ma vie, où j'ai élevé ma famille et
que; j'espère bien ne jamais quitter.
« Rive-de-Gier est une ville tout à fait exceptionnelle, peut-être unique, par l'homogénéité de sa population. Véritable cité du travail, elle ne renferme que des travailleurs ; les nobles, les grands propriétaires
terriens, et avec eux tous les oisifs, en ont été chassés par la
Révolution, acceptée ici avec enthousiasme. Elle est caractérisée par la poussière noire du
charbon, par les fumées de l'industrie, par l'état autrefois déplorable des voies de communication. Tous les habitants actuels ont une origine commune.
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Rive de Gier - L'Hôtel de
Ville
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« Fils de travailleurs, ils n'ont pas renié les traditions de leurs ancêtres ; ils continuent à
travailler, quelle que soit la fortune, quelle que soit l'élévation à laquelle leur labeur les ait fait
parvenir. Dans ce milieu d'élection, les bienfaits d'un gouvernement libéral et démocratique
porteront, plus vile qu'ailleurs, tous leurs fruits. Un jour viendra, plus rapproché peut-être qu'on ne
pense, où tous les cœurs ripagériens battront à l'unisson, où les discordes politiques et religieuses ne résisteront pas à la pratique de la
liberté, au développement de l'instruction, où les édiles qui siégeront ici seront choisis par leurs
concitoyens, sans autre préoccupation que le bien du pays, parmi les plus sages, les plus
éclairés, les plus laborieux.
« La construction qui nous abrite a marqué, il y a juste un siècle, les débuts de notre cité dans l'industrie ; sa transformation en Hôtel de Ville
marquera, je l'espère, un nouveau pas vers le progrès.
« Je vous invite, Messieurs, à boire à l'avenir de Rive-de-Gier.
« 4 février 1892.
« Lavé. »
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Rive de Gier - L'Hôtel de
Ville et la Bassin - 1905
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En 1840, la salle de la Justice de paix se trouvait au premier étage de la maison
Bajard, en face le pont de la Ville ; puis, en 1854, à 1a salle des concerts ; en 1855, au premier étage de la Mairie
(immeuble Fleurdelix), et enfin en 1892, au rez-de-chaussée de l'Hôtel de Ville
(hôtel du Canal).
En 1910, elle a été transférée momentanément, au premier étage, dans la salle de réception de M. le
Maire, salle insuffisante comme superficie ; aussi a-t-on dû la transporter, en 1912, dans l'ancienne salle de répétition de la Société musicale, sur les bords du canal, dans le corps de logis faisant suite à la gendarmerie.
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Rive de Gier - L'Hôtel de
Ville et la Bassin - 1906
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En 1840, le service des Postes se trouvait au rez-de-chaussée de la maison
Bajard, en face le pont de la Ville ; en 1848, il avait été transporté rue
Palluy, dans le terrain occupé plus tard par l'immeuble Petin et dont le propriétaire actuel est M. Jean-Marie
Marrel, puis au rez-de-chaussée de la maison Besson, en dessous de l'Hôtel de Ville, et enfin de I851 à 1892, au rez-de-chaussée de la maison du docteur
Kossiakewitch, sur le quai Fleurdelix.
En 1860, on établissait un bureau télégraphique.
En 1910, le service des Postes se trouvant trop restreint dans l'espace qui lui avait été accordé au début, on a dû procéder à un agrandissement en disposant de la salle de la Justice de paix et en mettant l'entrée principale sur la place de la
Mairie. On y a installé aussi le service téléphonique qui avait été ouvert le 20 juin 1893.
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Rive de Gier - L'Hôtel de
Ville et la Bassin - 1909
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